Marie-Sarah BouchardPas besoin de dire adieu

Prendre le large, se barrer, ficher le camp, n’est-ce pas ce qu’il faut toujours choisir ?

Notre entretien
avec l’autrice

Dans chacune de vos nouvelles, il y a un personnage qui décide de couper les ponts avec d’anciennes amours, des amis d’autrefois ou son milieu de travail. Il ou elle tourne le dos sans s’expliquer. Pourquoi est-ce si difficile de dire adieu ?

Je ne sais pas si c’est difficile pour tout le monde ! Je pense que pour certaines personnes, prendre la fuite sans se retourner est une façon de mener sa vie. Il semble y avoir des gens chez qui ça ne suscite pas de culpabilité, et c’est quelque chose de fascinant pour moi. Pour d’autres au contraire, il n’y a rien de plus difficile que de couper les ponts, même quand ça s’impose pour leur survie.

Pourquoi avoir écrit des nouvelles brèves constituées de fragments ? Qu’est-ce qui vous attirait dans cette forme ?

Pour moi, écrire des fictions brèves, c’est une espèce de fuite. On dit adieu rapidement aux personnages et aux contextes pour passer à autre chose. J’aime les nouvelles parce qu’il y a une jouissance quand on arrive à la chute – tant pour l’autrice que pour les lecteurs, à mon avis. Et dans le recueil, c’est un plaisir qui se renouvelle douze fois.

 

Vos personnages viennent de milieux culturels et sociaux différents, appartiennent à des générations différentes, mais vous semblez prendre un malin plaisir à vous glisser dans la peau de chacun. Comment choisissez-vous les personnages ? Les situations ? Qu’est-ce qui vous intéresse chez eux ? En elles ?

Pouvoir devenir quelqu’un d’autre, c’est l’une des choses merveilleuses de l’écriture. Mais ça ne me vient pas toujours si facilement. Je pense que pour écrire sur un personnage ou un contexte que je n’ai pas vécu moi-même, je dois parler avec les gens et les écouter sincèrement. C’est un travail qui a beaucoup à voir avec l’empathie. Je suis quelqu’un d’extraverti et les autres humains sont pour moi un carburant à la création. C’est donc dans le milieu d’une conversation que les idées me viennent souvent, il y a un instant bien précis où mon interlocuteur me raconte un pan de sa vie et ça me frappe, bingo, je dois lui voler cette anecdote et cette émotion !