Brigitte HaentjensSombre est la nuit

Vacances sous des cieux tourmentés.

Notre entretien
avec Brigitte Haentjens

 

Pourquoi avoir choisi le Mexique comme décor à l’effondrement de ce couple d’intellectuels éminemment parisiens ?

Comme toujours, mes choix sont instinctifs. Après coup, je me dis que le Mexique n’est pas une destination typique des Français, que les personnages du livre ont visité le Mexique et les pays latins au départ pour des raisons politiques.

 

Les souvenirs de la narratrice nous font revivre toute l’actualité sociale et politique depuis les années 1970. En quoi l’histoire de son couple éclaire-t-elle celle de l’époque qu’elle évoque, et vice-versa ?

Ce que je cherchais dans ce livre, c’est la description de situations intimes et politiques, on pourrait dire que le politique influe sur l’intime et réciproquement peut-être. J’ai toujours aimé les écritures politiques, en particulier en théâtre. Heiner Müller, Lars Norén, etc.  Actuellement, nous travaillons Coriolan de Shakespeare, une pièce véritablement politique et dans laquelle le héros (Coriolan lui-même) voit s’imbriquer ces deux dimensions. Après l’utopie de Mai 68, la chute fut très raide. La répression des mouvements d’extrême gauche fut violente.

 

La narratrice, comme son compagnon, est psychanalyste. Cela nous laisserait penser qu’elle accorde un grand pouvoir aux mots. Pourtant, ceux-ci ne semblent pas lui apporter la libération attendue. Pourquoi ?

Elle accorde un grand pouvoir aux mots, c’est vrai, mais comme souvent chez les psychanalystes, elle écoute les mots des autres. C’est toujours plus « facile » d’analyser les autres que soi-même, même si, dans le processus psychanalytique, on se doit de voir quelqu’un qui peut nous aider dans le travail, et en particulier dans les cas de transferts et contre-transferts.

 

Dans ce portrait d’un couple en dissolution, vous donnez la parole à la femme seulement. Mais, en toute justice, n’aurait-il pas fallu également entendre celle de l’homme ?

La justice m’indiffère en matière de littérature ou d’art. Je n’avais aucun désir de l’entendre, lui, contrairement à la thérapie de couple, où chacun doit s’exprimer à tour de rôle. Ce qui m’intéressait, c’est que l’on comprenne (ou non) par transparence ce qui la retient, elle. Il me semble que les femmes en particulier peuvent s’identifier à ce processus où l’emprise cause dépendance et douleur.