Stanley PéanNoir satin

Des femmes qui ont marqué le jazz retrouvent leur juste place dans l’Histoire.

Notre entretien
avec l’auteur

Votre nouvel ouvrage propose quinze portraits de musiciennes, toutes afro-américaines à une exception près, qui ont été injustement oubliées. Comment se fait-il que l’importance de ces femmes ne soit redécouverte qu’aujourd’hui? Certaines de ces femmes ont-elles toutefois atteint la célébrité de leur vivant?

L’Histoire, comme l’a un jour écrit mon ami et préfacier Gilles Archambault, est une comédie d’erreurs et d’omissions. Elle a de plus un biais nettement phallocrate. Ces femmes sont tombées dans l’oubli parce qu’elles sont des femmes. Et bien que beaucoup d’entre elles figurent dans les ouvrages de référence sur le jazz, leurs contributions sont rarement présentées comme équivalentes à celles de leurs collègues masculins. Pourtant, il va sans dire que plusieurs de ces artistes ont atteint une certaine notoriété de leur vivant. C’est leur legs que je voulais mettre de l’avant.

Quand on pense aux femmes qui ont marqué le jazz, on pense avant tout à des chanteuses – Billie Holiday, Ella Fitzgerald ou encore Nina Simone, qui a su conjuguer ses talents de pianiste à sa voix éraillée si particulière. Pourtant, dans votre livre, il est aussi question de compositrices et d’instrumentistes. Était-ce encore plus difficile pour elles de « percer »?

Oui, il était plus difficile pour des artistes comme la tromboniste Melba Liston ou la pianiste Dorothy Donegan de briller à la hauteur de leur talent, justement parce qu’elles étaient des femmes, parce que le jazz a pendant longtemps été un milieu majoritairement masculin, et que les rigueurs du métier (à leur époque) pouvaient les dissuader de prendre la route, de tourner dans certaines régions des États-Unis ou ailleurs. Et puis un certain nombre de préjugés, notamment l’idée que la trompette, le trombone ou certains autres instruments n’étaient pas convenables pour une femme, les ont desservies.


 

Ces femmes sont tombées dans l’oubli parce qu’elles sont des femmes. Et bien que beaucoup d’entre elles figurent dans les ouvrages de référence sur le jazz, leurs contributions sont rarement présentées comme équivalentes à celles de leurs collègues masculins.

Extrait de l’entretien


 

Si vous ne deviez retenir qu’un seul morceau écrit par l’une des compositrices que vous convoquez, lequel choisiriez-vous?

J’opterais pour l’ambitieuse Zodiac Suite de Mary Lou Williams.

Peut-on s’attendre à des émissions consacrées à ces musiciennes à Quand le jazz est là, votre émission sur les ondes d’ICI Musique?

Tout au long de l’écriture de ce livre, alors que certains de ses chapitres paraissaient en revue dans L’Inconvénient, il m’est arrivé de partager mon enthousiasme avec les auditeurs pour l’œuvre de ces grandes musiciennes négligées ou oubliées. Encore récemment, durant le mois de l’Histoire des Noirs, j’ai consacré une émission aux afro-américaines parmi elles. Et je compte bien continuer à garder leur musique vivante. Parce qu’elle en vaut la peine, d’abord. Et parce que c’est une affaire de justice.