En résumé
« Capi » Blanchet est née à Montréal en 1891. En 1926, après la mort de son mari, elle s’embarque avec ses cinq jeunes enfants à bord du voilier familial, le Caprice, pour explorer la côte de la Colombie-Britannique. Ils vont répéter ce périple au cours des quinze années suivantes, s’enfonçant dans des fjords bordés de falaises vertigineuses, mouillant dans des criques qui ne figurent sur aucune carte, visitant les hivernements abandonnés des Indiens. Ils créeront ainsi leur propre royaume, qu’ils exploreront inlassablement. En 1961, juste avant sa mort, elle publiera le récit de ses voyages sous le titre The Curve of Time.
Les profondes connaissances de Capi – sur le mouvement compliqué des marées, sur les étonnants rites funéraires des Indiens, sur les habitudes des poissons – sont d’autant plus fascinantes qu’elles ne sont jamais un frein à sa capacité d’émerveillement. Mais ce qui rend le royaume de la famille si attachant, ce sont également les sujets qui le peuplent. Il y a Phil, ce Canadien français dont on dit qu’il a tué un homme « là-bas, au Québec », et qui est un as pour trapper les cougars et terroriser ses chèvres. Il y a celui qu’ils appellent Robinson Crusoé, qui vit nu, ensauvagé, entouré d’une douzaine de chèvres, et qui s’occupe de son élevage de visons sur une île minuscule où Capi a jeté l’ancre. Il y a enfin cette ourse, accompagnée de ses petits, qui s’approche des enfants occupés à nettoyer des poissons sur une plage, et que Capi met en déroute, répondant aveuglément au besoin de protéger sa propre progéniture.
Un après l’autre, les pics enneigés écartaient les nuages, penchaient leurs têtes brillantes pour nous voir passer et se retournaient à chaque coude du fjord pour nous offrir de nouvelles beautés. Puis une brise légère s’est mise à dessiner des motifs changeants sur l’eau calme. Nous avons hissé les voiles pour assister en douceur notre progression vers l’intérieur des terres.
Extrait du livre
Traduit de l’anglais (Canada) par Louis Hamelin
Livre publié dans la collection « L’œil américain »